Déforestation, bétonisation, surpêche, pollution et désormais le changement climatique. Ce sont les principaux périls qui menacent l’effondrement de la biodiversité à l’échelle mondiale. Si de nos jours, plusieurs milliers d’espèces ont disparu de notre planète, un nombre plus considérable reste menacé d’extinction. C’est dans un tel contexte que la 15e Conférence des Partie à la Convention sur la diversité biologique des Nations unies (COP15) se tient du 7 au 19 décembre 2022 à Montréal, Canada. La volonté affichée est de développer un « cadre mondial commun pour restaurer et protéger la biodiversité ».
Après la conférence mondiale sur le climat tenue du 06 au 20 novembre à Sharm-el-Sheikh, en Egypte, vient le tour de la Cop 15 sur la biodiversité. Comme pour le climat, la situation mondiale de la biodiversité est aussi alarmante et impose des actions forte et concertée. Les spécialistes de la question s’accordent pour dire que la destruction de la biodiversité est aussi nuisible pour les sociétés que la crise climatique. Le Rapport Planète Vivante 2022 du WWF révèle une « chute moyenne de 69% des populations de faune vertébrée surveillées entre 1970 et 2018 ». En effet, les populations de vertébrés étudiés par l’ONG depuis plusieurs décennies (poissons, oiseaux, mammifères, amphibiens et reptiles) ont connu une perte de plus de la moitié en moins d’un demi-siècle. Les principales causes de cette hécatombe sont l’extension des surfaces agricoles et la déforestation, ainsi que la surexploitation des espèces comme la surpêche, le braconnage, la pollution. Désormais la crise climatique vient ajouter sa touche en aggravant la situation.
Les Changements climatiques accélèrent les pertes de la biodiversité
Selon l’organisation de défense de la nature, les tortues luth, les plus grosses tortues marines au monde, qui étaient encore des milliers à pondre sur les plages de Guyane il y a 20 ans ne sont qu’une petite vingtaine aujourd’hui. Pour Arnaud Gauffier, en charge de la conservation au WWF France, « La principale cause jusqu’à présent, c’était la pêche illégale, avec les tortues qui se prennent dans les filets. Aujourd’hui, ce qu’on voit, c’est que le changement climatique est en train de prendre une place prépondérante en termes de menace sur cette tortue liée à l’érosion des plages. Donc les tortues ne trouvent plus de sites de ponte. D’autre part, il y a l’augmentation de la température du sable puisque plus les sables sont chauds et plus, on a de chance d’avoir des tortues femelles, ce qui fait que l’espèce n’est plus en capacité de se reproduire. »
Un animal comme l’éléphant en Afrique est fortement menacé non seulement par le braconnage mais aussi par les changements climatiques. Ainsi, le représentant de l’organisation en France indique qu’« il y a toujours un fort braconnage sur les éléphants, même si celui-ci s’est ralenti, il y a la compétition avec les populations locales pour les espaces. Donc étant donné que les éléphants ont peu de place aujourd’hui pour migrer, pour se nourrir, ils viennent souvent détruire des récoltes et donc en mesure rétorsion sont abattus par des paysans locaux ». Il ajoute dans la foulée qu’à cause du « changement climatique qui modifie le régime des pluies, en particulier pour l’éléphant de savane », ce dernier éprouve « de plus en plus de difficultés à s’alimenter.»
Il ressort du rapport que la population des éléphants de forêt a chuté de 86% en 30 ans, pendant que celle des éléphants de savane a diminué de 60%. Ces chiffres ne représentent que la partie visible de l’iceberg.
La COP 15, un espoir pour changer la donne !
A l’ouverture des travaux, le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a souligné l’importance de cet événement sur une tonalité acerbe en ces termes : « Avec notre appétit sans limite pour une croissance économique incontrôlée et inégale, l’humanité est devenue une arme d’extinction massive ».
Un ton qui permettra peut-être aux 190 pays réunis à Montréal, représentés par leurs ministres de l’Environnement respectifs, de trouver un accord historique pour sauver les espèces et les milieux naturels d’une destruction irréversible.
En rappel, plusieurs enjeux sous-tendent cette 15e COP. De manière générale, il est question d’adopter un nouveau cadre mondial décennal pour sauvegarder la nature et ses ressources indispensables à l’humanité. Pour ce faire, un accord d’une vingtaine d’objectifs doit être concrétiser, dont le principal vise à protéger 30% des terres et des mers. D’autres points prévoient la restauration des milieux naturels, la réduction des pesticides, la lutte contre les espèces invasives, ou les conditions d’une pêche et d’une agriculture durables.
Quid du financement !
Les pays du sud affichent une réclamation de financement par les pays riches pour la mise en œuvre des actions de préservation et de restauration. Ainsi, au moins 100 milliards de dollars par an pour la biodiversité, autant que pour le climat, et 700 milliards de dollars par an d’ici 2030.
Certains pays veulent voir la mise en place d’un fonds dédié à la biodiversité. Un souhait qui butte déjà contre l’assentiment des du nord qui préfèrent améliorer les canaux existants, notamment les banques publiques de développement.
La question de la biopiraterie qui cristallise déjà des tensions est une préoccupation de délégation de pays notamment du sud. Ils exigent que les pays riches partagent enfin les bénéfices des cosmétiques et des médicaments dérivés des ressources conservées au Sud.
En tout état de cause, le WWF appelle les dirigeants à la COP 15 de conclure un accord mondial ambitieux sur la biodiversité, « capable d’inverser la perte de biodiversité afin de garantir un monde positif pour la nature au cours de cette décennie ».
Hamidou TRAORE
(tr.hamidou@gmail.com)