Pour résister contre les effets pervers des changements climatiques sur leurs ressources naturelles vitales, les populations des communes rurales de Baskouré et de Kando, (région du Centre-Est) ont planté plus de 40 000 plants, de cinq variétés sur une superficie de 75 hectares. Cette action écocitoyenne vise à sauvegarder leurs ressources naturelles vitales dans l’intérêt de tous et des générations à venir.
C’est dans une ambiance de convivialité au rythme des mélodies de tambours et de tam-tams que les forêts villageoises de Kampelsé Zougo (dans la commune de Kando) et de Komsilga 1 (commune de de Baskouré), ont connu un renforcement en plants. Ainsi, 25 000 plants et 15 000 plants ont été mise en terre respectivement dans les forêts villageoises de Komsilga 1 et de Kampelsé Zougo. A cette occasion, femmes, hommes, jeunes et même les enfants se sont mobilisés pour restaurer ces forêts d’où ils tirent une flopée d’avantages vitaux. Ces milliers de plants ont été planté dans toutes les clairières des deux forêts aux fins renforcer leur végétation et leur biodiversité. Les autorités coutumières et communales de ces deux communes se sont également associées à cette action de sauvegarde. Pour joindre l’utile à l’agréable, le Programme Intégré de Développement et d’Adaptation aux Changements Climatiques dans le Bassin du Niger (PIDACC/BN) -qui est un projet mis en place par les neuf Etats membres de l’Autorité du Bassin du Niger dont le Burkina Faso-, a apporté divers appuis notamment financiers et en expertise à cette activité de renforcement du capital végétal des deux forêts. Ainsi, selon la coordinatrice nationale, Fatoumata Flore Siri/Ira, le PIDACC/BN a commis des experts et des personnes averties des questions d’adaptation aux changements climatiques pour mieux mener ces opérations. C’est d’ailleurs sous l’œil avisé de ces derniers que les reboisements s’est tenu. Mais, ce sont ces professionnels de la problématique des changements climatiques qui ont procédé au choix des plants à mettre en terre. Selon, Begagnon Bazié, chef de service de l’environnement de Baskouré, -ayant participé au choix de ces plants-, ces différentes espèces plantées ont de leurs multiples avantages socio-économiques et mêmes environnementales.
Les cinq espèces ayant servi pour renforcer le capital végétal de ces deux forêts sont : l’adansonia digitata c’est-à-dire le baobab, le parkia biglobosa ou le néré, l’acacia nilotica, le Bauhinia rufescens, l’acacia albida. Elles sont profitables pour l’Homme à plusieurs égards, pour les animaux et elles ont une capacité avérée pour restaurer la biodiversité de ces deux forêts (voir le zoom sur chaque espèce en encadré). C’est aussi cette quête de restauration et l’élan de résistance aux effets néfastes des changements climatiques qui ont convaincu l’institution que dirige Fatoumata Flore Siri/Ira à prêter main forte à ces populations. La coordonnatrice rappelle d’ailleurs qu’en plus d’induire des mesures d’adaptation aux changements climatiques, le PIDACC vise également l’amélioration et le renforcement des moyens de subsistance des populations par la sauvegarde des ressources naturelles comme les forêts, les ressources en eau. C’est d’ailleurs la conjugaison de ces deux préoccupations qui a milité en faveur du choix de cinq espèces d’arbre plantées dans les forêts de Kando et de Baskouré.
Un SOS pour l’entretien des jeunes plants
Alain Ima, maire de la commune de Kando s’est longuement confondu en remerciement vis-à-vis du PIDACC pour les divers soutiens notamment en argent, en expertises, appui-conseils, etc. Il estime à environ 49% le taux de réussite des plants mis en sol dans la forêt de sa commune, pendant que ce taux s’élève à 93% dans la forêt de Baskouré. Les acteurs sur le terrain s’accordent pour dire le manque d’eau est une grosse préoccupation qui les assaillent. Moussa Kaboré, le responsable du Comité villageois de développement (CVD) et son équipe s’évertuent à parcourir de longues distances pour chercher l’eau afin d’arroser les plants. Ce dernier signale que c’est la carence en eau qui est le principal facteur de la mort des plants. Malgré leur détermination, ils ne parvenaient pas à entretenir convenablement tous les plants au regard de leur grande quantité. En plus, une grande partie des plants n’est pas protégée par des grilles. Ce qui permet aux singes de les arracher. Le maire Alain Ima et le Le responsable du CVD ont profité du passage des journalistes pour lancer un SOS aux fins de bénéficier de boulie ou tout autres moyens pour disposer d’eau pour assurer l’entretien des plants. Idem pour les grilles. Informée de ces difficultés, la coordonnatrice nationale du PIDACC/BN Burkina assure que des solutions curatives seront étudiées et envisagées pour ne pas laisser ces plants mourir. Notons que le chef, le Naaba Koulougga de Baskouré qui s’est associé au projet en mobilisant la population a signifié sa disponibilité pour le succès du programme dans sa localité.
Fatoumata Flore Siri/Ira rappelle que le programme PIDACC a été initié par l’Autorité du Bassin du Niger (ABN) avec les neuf (09) pays membres dont le Burkina Faso. Ce programme a vu le jour grâce à l’appui technique et financier de la Banque africaine de Développement (BAD) avec ses partenaires que sont l’Union Européenne, le Fonds vert pour le climat, le Fonds pour l’environnement mondial.
Hamidou TRAORE
Des vertus avérées des espèces végétales
L’Acacia Albida
L’Acacia Albida, sous d’autres cieux comme dans les zones du Nord Cameroun, du Sud du Tchad et de la Centrafrique est qualifié de « véritable arbre miracle » par des spécialistes du domaine forestier qui incitent à sa culture et à sa protection. Cette plante a des particularités qui la rendent spéciale. Elle a une stratégie de vie inversée par rapport à la plupart des arbres de zones arides. Il est le seul arbre de la zone semi-aride Sahelienne à perdre ses feuilles à la saison des pluies et à reverdir en fin de saison des pluies, en prolongeant sa période de feuillaison en saison sèche (« phénologie inversée »). Cet arbre produit des feuilles et des gousses que le bétail raffole. Par ailleurs, en saison sèche le bétail aime s’abriter sous son ombre car il y trouve de la nourriture. Cette présence du bétail enrichit les dessous de l’arbre avec ses excréments. Perdant ses feuilles en début de la nouvelle saison des pluies, elles se décomposent mieux et il se forme donc une couche de feuilles qui s’ajoutent aux excréments des animaux. Dès les premières pluies, on obtient un mélange qui se transforme en humus très riche pour les cultures. C’est d’ailleurs pour cette raison que les paysans accourent pour semer le mil sous l’acacia. Et il est généralement constaté que le mil y pousse beaucoup mieux que dans les autres champs. L’Acacia Albida est par conséquent un arbre profitable à l’éleveur et au cultivateur. Il fournit également du bois de chauffe avec ses branches mortes et c’est aussi un bon bois d’œuvre dans lequel on peut tailler des objets divers. C’est une espèce intéressante pour l’agroforesterie car elle offre un ombrage et un fourrage apprécié du bétail. Sa racine pivotante pénétrant profondément le sol (jusqu’à 15 m de profondeur) le rend très résistant à la sécheresse. Il résiste aux inondations. Il s’alimente dans les nappes phréatiques profondes et ne concurrence pas les cultures. De plus sa litière améliore les sols. L’espèce est bien indiquée pour la pratique de l’agriculture de subsistance où la culture est une céréale (mil, sorgho et maïs). L’arbre fournit également du bois et le tannin de son écorce, ses fruits et ses feuilles sont utilisés dans la pharmacopée traditionnelle. Ainsi, on utilise l’écorce et les racines externe ou interne contre les infections respiratoires, les troubles digestifs, la malaria et la fièvre. L’écorce est utilisée pour nettoyer les dents, car il est censé contenir du fluor, un extrait est utilisé pour les maux de dents chez les humains et les infections oculaires chez le bétail. L’acacia albida est également une espèce importante au Sahel pour l’apiculture, car ses fleurs fournissent du pollen aux abeilles à la fin de la saison des pluies, quand la plupart des autres plantes locales n’en ont pas. Les gousses sont très importantes pour l’alimentation du bétail (bovins, dromadaires, etc.).
H T
Le parkia biglobosa
Plusieurs vertus sont attribuées par les spécialistes au parkia biglobosa communément appelé le néré. Du point de vue nutriment, cette plante apporte à l’organisme des éléments nutritifs essentiels comme les protides, lipides, glucides, iode, vitamines diverses. Elle constitue à ce titre une source très importante en termes d’alimentation et de nutrition de qualité. En plus, en matière de santé végétale, l’environnementaliste indique que le néré est une plante efficace dans la protection des cultures contre les attaques des bruches et contre les termites. En référence aux nombreux usages liés à cet arbre, il se dit couramment, en zone de savane que « tout, de la racine à la cime, contribue à la survie de l’homme ». Le médecin et botaniste français Edouard Heckel (1843 – 1916) qualifie d’ailleurs ce végétal de « providentiel ». « Les Africains considèrent le néré comme un présent du ciel et l’empirisme des natifs a été encore une fois bien inspiré pour le choix de cet aliment de premier ordre comme (…) médicament précieux d’origine végétale », écrit-il dans ouvrage « Les végétaux utiles de l’Afrique tropicale », 1887.
Selon une étude menée par le Centre de recherche et de formation sur les plantes médicinales de l’université du Bénin intitulée « Contribution à l’étude des propriétés pharmacologiques des extraits hydro-alcooliques des graines de Parkia biglobosa », les fleurs rouges du néré sont efficaces pour guérir l’angine, tout comme le soumbara (produit fait à base des graines de néré) sert de traitement des abcès en provoquant la suppuration. Ses écorces et ses racines seraient aussi employées avec d’autres végétaux contre la stérilité, les maladies vénériennes, la bronchite. Selon la même étude, « le rameau de la plante est un remède contre les morsures de serpent, les fleurs soignent la lèpre, la pulpe du fruit lutte contre la fièvre jaune, la constipation, l’ictère ».
Outre, dans la pharmacopée traditionnelle, la pulpe du néré est considérée comme diurétique (qui augmente la sécrétion de l’urine) et fébrifuge (qui fait baisser la fièvre). Il y a lieu de rappeler que de plus en plus, le commerce d’une flopée de produits à base de néré occupe une place non négligeable dans l’économie d’un grand nombre de pays africains dont le Burkina Faso où il procure aux femmes des revenus appréciables. Malheureusement, les arbres de néré tendent à se raréfier.
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L’acacia nilotica
L’acacia nilotica ou le Nèb-Nèb (appellation française) contient une gomme et est généralement utilisée dans la fabrication des friandises et de bonbons. Ses racines soignent la carie dentaire, et bien d’autres inflammations diverses. Ces feuilles sont souvent utilisées pour traiter la diarrhée et la dysenterie. Aussi, en agro-sylvo-pastorales, l’espèce est très appréciée par les animaux pour ses gousses et ses feuilles.
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L’adansonia digitata
L’adansonia digitata ou le baobab, arbre auréolé dans l’Afrique entière de tout une quantité de légendes, de superstitions, de récits populaires et de références anecdotiques, s’avère également être un concentré de multiples vertus. Ses feuilles sont utilisées soit fraîches en légume cuit, soit séchées et réduites en poudre pour servir d’ingrédient de soupes ou de sauces. Les pousses et les racines des jeunes plantes se consomment également. En temps de famine en Afrique de l’Ouest, on consomme les racines cuites à l’eau. Les fruits communément appelés le « pain de singe » contiennent une pulpe tendre, blanche, comestible et nourrissante. Elle sert à faire cailler le lait, on la mange en dessert et on l’utilise pour faire de la bouillie, des boissons rafraîchissantes ou des crèmes glacées. Les graines s’emploient pour imiter les cacahuètes et on peut s’en servir pour remplacer le café. Une huile peut être extraite de l’amande des graines par ébullition et distillation. Semi-fluide, cette huile suave d’un jaune d’or possède une longue durée de conservation. On s’en sert pour la cuisine et en cosmétique. La pulpe sert à fumer le poisson et la fumée aide à repousser les insectes qui harcèlent le bétail. On se sert de toutes les parties de la plante pour traiter la fièvre.
Le bétail mange les feuilles et les fleurs tombées, et pendant la saison sèche on le nourrit de pulpe de fruit et de graines. On nourrit aussi le bétail avec les résidus provenant de l’extraction d’huile.
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Bauhinias rufescens
Bauhinias rufescens est également reconnu notoirement comme une plante médicinale africaine. Cette plante a des propriétés thérapeutiques diurétiques et fébrifuges (qui fait baisser la fièvre), cholagogues (facilite l’évacuation de la bile) et antidiarrhéiques. Outre, son utilisation permet d’enrayer de nombreux troubles ophtalmologiques et de la sphère ORL (oto-rhino-laryngologiste) tels que les oreillons et les otites ainsi que les conjonctivites, diverses affections des yeux, des blépharites (inflammation du revêtement cutané des paupières), des cataractes et de certaines cécités, des glaucomes et des héméralopies (diminution anormale de la vision), des kératites (inflammation de la cornée) et des trachomes (infection oculaire bactérienne). Ses racines servent pour soigner la fièvre et les coliques, les diarrhées et la dysenterie, ainsi que les nausées.
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