Par Hamidou TRAORE, tr.hamidou@gmail.com
De l’Europe à l’Asie, les gouvernements misent sur l’éolien offshore pour réduire leur dépendance aux énergies fossiles. Une étude d’Ember et de la GOWA montre que la capacité installée pourrait tripler d’ici 2030. Si la Chine mène la course, les États-Unis peinent à suivre, freinés par les incertitudes politiques et les coûts du marché. L’éolien offshore en passe de tripler d’ici 2030, malgré les vents contraires aux États-Unis
Le vent continue de souffler en faveur de l’éolien en mer. Selon une nouvelle analyse publiée par le groupe de réflexion Ember et la Global Offshore Wind Alliance (GOWA), la capacité mondiale d’éolien offshore pourrait tripler d’ici 2030, et ce malgré le ralentissement du marché américain. Le reste du monde maintient le cap, convaincu que cette technologie jouera un rôle central dans les futurs systèmes énergétiques décarbonés.
Des objectifs nationaux toujours plus ambitieux
L’étude d’Ember et de la GOWA dresse un état des lieux sans équivoque : 27 pays, 27 gouvernements infranationaux et trois régions disposent désormais d’objectifs formels en matière d’éolien offshore. Cette dynamique témoigne de l’efficacité des politiques publiques lorsqu’elles fixent un cadre clair et crédible, capable de débloquer les investissements et d’accélérer le développement industriel.
À l’horizon 2030, les engagements nationaux cumulés atteignent 263 gigawatts (GW), hors Chine, qui n’a pas encore fixé d’objectif officiel à l’échelle nationale. L’Europe reste la région la plus avancée, avec 15 pays visant ensemble 99 GW, tandis que l’Asie connaît une montée en puissance spectaculaire : l’Inde vise entre 30 et 37 GW, le Japon ambitionne 41 GW d’ici 2040, dont 15 GW d’éolien flottant, et la Corée du Sud, Taïwan et le Vietnam affichent un objectif commun de 41 GW.

Pékin muscle son jeu
La Chine, déjà leader mondial du secteur, a donné un nouveau coup d’accélérateur. Le 20 octobre, elle a signé la Déclaration de Pékin 2.0, qui fixe un plan de développement ambitieux : au moins 15 GW d’éolien offshore installés chaque année durant le quinzième plan quinquennal (2026-2030). C’est presque le double du rythme observé au cours de la période 2021-2025.
À ce jour, onze provinces côtières ont déjà inscrit dans leurs plans des objectifs totalisant 64 GW d’ici 2025. Pékin confirme ainsi son intention de consolider son avance technologique et industrielle dans le domaine des énergies marines.
L’après-2030 se dessine déjà
L’échéance de 2030 ne constitue qu’une étape. Dix-huit pays ont déjà annoncé des objectifs à plus long terme, signe d’une volonté d’intégrer durablement l’éolien offshore dans leur bouquet énergétique. Par ailleurs, sept pays misent sur l’éolien flottant, une technologie encore émergente, mais considérée comme cruciale pour exploiter le potentiel des zones maritimes profondes.
Les États-Unis à la traîne
Le contraste est frappant. Aux États-Unis, la dynamique s’essouffle. Malgré le maintien de l’objectif fédéral de 30 GW d’ici 2030, les incertitudes politiques et la hausse des coûts de financement fragilisent le secteur. Plusieurs projets ont été retardés ou révisés à la baisse.
Pour autant, les États fédérés poursuivent leurs efforts : onze d’entre eux visent à eux seuls 84 GW, et environ 5,8 GW devraient être mis en service d’ici 2029, grâce aux cinq chantiers actuellement en construction. La transition énergétique américaine semble donc se jouer davantage à l’échelle locale qu’à Washington.
Un leadership politique décisif
Pour Ember, la réussite de la filière repose sur un facteur clé : l’impulsion gouvernementale. Les pays dépourvus d’objectifs clairs sont invités à en fixer rapidement, tandis que les plus avancés sont appelés à rehausser leurs ambitions. Selon Dave Jones, analyste en chef chez Ember, « l’éolien offshore fournit déjà 83 GW de capacité dans le monde, de quoi alimenter 73 millions de foyers ». Et d’ajouter : « Pour ceux qui hésitent encore, le message est simple : c’est maintenant qu’il faut agir. »
Une pierre angulaire de la transition énergétique
Du côté de la GOWA, le ton est tout aussi optimiste. « Malgré les défis récents, les fondamentaux restent solides », souligne Amisha Patel, cheffe du secrétariat de l’alliance. « L’éolien offshore est une technologie éprouvée et indispensable à la réalisation des objectifs de l’Accord de Paris. »
L’organisation appelle à une action collective renforcée entre gouvernements et industrie, afin de transformer les ambitions en résultats concrets. L’adhésion du Brésil à la GOWA lors de la COP28 et sa future présidence de la COP30 symbolisent, selon elle, cette volonté de mondialiser le mouvement.
Une décennie décisive
Alors que la planète cherche à concilier sécurité énergétique et réduction des émissions, l’éolien offshore apparaît plus que jamais comme un pilier de la croissance verte. Si les promesses actuelles se concrétisent, le monde pourrait disposer de plus de 260 GW d’ici 2030, contre 83 GW aujourd’hui.
Un cap ambitieux, mais essentiel, pour espérer maintenir le réchauffement climatique en dessous de 1,5 °C.
Hamidou TRAORE
