L’Organisation non gouvernementale Oxfam vient de publier un rapport explosif, en ce début juin 2022, sur la crise climatique que traverse notre planète. En plus des catastrophes naturelles induites par le dérèglement climatique qui s’enchainent avec leurs cortèges de drame humanitaire, ce rapport révèle une autre tragédie : l’insuffisance criardes des financements pour faire face aux drames humanitaires.
Il ressort formellement de l’étude que les besoins en financement nécessaire pour agir conséquemment contre les effets désastreux des événements climatiques extrêmes comme les inondations, les sécheresses sont « aujourd’hui huit fois plus importants qu’il y a 20 ans ». En d’autres termes, ces besoins de financement par an qui se chiffraient en moyenne à au moins 1,6 milliard de dollars entre 2000 et 2002, ont explosé pour atteindre une moyenne de 15,5 milliards de dollars entre 2019 et 2021, ce qui représente une augmentation de 819 %. L’ONG se désole du fait que depuis 2017, les pays riches qu’elle accuse comme les principaux responsables de la crise climatique que subit le monde, « n’auraient apporté que 54 % des sommes demandées par ces appels, soit un déficit d’environ 33 milliards de dollars ».
Malheureusement, le paradoxe est que ce sont les pays qui ont moins ou quasi pas contribué à la crise climatique qui paient un lourd tribut et constituent les principales cibles de ces besoins de financement. Ainsi, Oxfam affirme que les pays qui ont le plus besoin de financement en raison des catastrophes climatiques extrêmes qu’ils subissent sont notamment l’Afghanistan, le Burundi, la République démocratique du Congo, Haïti, le Kenya, la Somalie, le Soudan du Sud et le Zimbabwe et dans la région du Sahel, le Burkina Faso, le Tchad et le Niger. Le rapport d’Oxfam intitulé « L’heure des comptes » précise que l’intensification des impacts climatiques entrainant des pertes et des dommages aggrave les besoins humanitaires. Malheureusement, les organisations humanitaires œuvrant pour apporter un soulagement aux populations victimes sont débordées par les appels à l’aide. A titre d’illustration, l’étude signale que, « près de la moitié des appels de ces cinq dernières années n’ont pas été satisfaits. Le financement de la réponse humanitaire d’urgence est parcellaire et déplorablement insuffisant, tout comme le soutien plus large déployé pour faire face aux pertes et dommages, comme la reconstruction des habitations et des infrastructures vitales ». Pour changer la donne, l’ONG autrice de l’étude appelle les pays principaux responsables du dérèglement climatique à mobiliser les fonds nécessaires pour assurer une prise en charge efficace et efficiente des conséquences de cette crise. Cette organisation qui fait également de la lutte contre les inégalités son cheval de batail déclare que le fossé entre riche et pauvre s’élargira davantage à cause des effets pervers de la crise climatique.
« Les pollueurs ont le devoir de payer »
Oxfam rappelle que les responsables de l’intensification du changement climatique sont bien les « pays riches auraient contribué à 92 % des émissions historiques excessives et seraient responsables de 37 % des émissions actuelles (alors qu’ils n’abritent que 15 % de la population mondiale) ». Elle ajoute qu’entre 1990 et 2015, les émissions de carbone des 1 % les plus riches dans le monde représentaient plus du double des émissions de la moitié la plus pauvre de l’humanité, et 71 % des émissions depuis 1988 peuvent être attribuées à seulement 100 producteurs d’énergies fossiles. A contrario, les pays à revenu faible sont les plus « durement touchés par le changement climatique », alors qu’ils n’y ont que « très peu contribué ». En effet, les émissions actuelles de l’Afrique représentent « moins de 4 % du total mondial (alors que le continent accueille 17 % de la population mondiale) ». Le Kenya, l’Éthiopie, la Somalie et le Soudan du Sud ne sont responsables que de 0,1 % des émissions mondiales, précise l’étude.
Pour Oxfam, il est indispensable d’obtenir de « toute urgence un soutien financier plus massif de la part des États, des entreprises et des particuliers portant la plus grande responsabilité dans cette crise climatique, qui sont aussi les plus aptes à payer ». Ainsi, elle appelle à la création d’un nouveau dispositif de financement pour rendre le « financement des pertes et dommages accessible et durable et compléter les engagements en matière d’adaptation, d’atténuation et d’aide publique au développement ». Elle préconise fortement que ce dispositif doit en outre être conforme aux principes de justice climatique.
Hamidou TRAORE